On pense souvent à tort que punir signifie éduquer. Pourtant, nous ne pouvons faire rimer ces deux idées sans créer d’anicroche.
A la fin d’une séance de sophrologie ludique, une maman me demandait s’il était juste et nécessaire de punir son enfant de 3 ans lorsqu’il faisait des bêtises. Mettre au coin plus ou moins longtemps, isoler le fautif quelques instants, disputer voire crier sont autant de punitions auxquelles de nombreux parents recourent très régulièrement. La liste n’est pas exhaustive. Et effectivement, dans l’effervescence quotidienne, qui n’a jamais mis au coin son enfant suite à une “bêtise”?
De l’intérêt de punir…
Si nous avions conscience de l’impact d’une punition sur notre cher petit, nous ne punirions plus jamais…du moins…nous punirions différemment ! Se questionner sur l’éducation de nos enfants est essentiel, presque vital. Etre parent c’est comme le dit l’adage: “Non pas faire ce que l’on veut mais ce que l’on peut. “Parfois le quotidien nous impose un rythme tel, que nous ne prenons plus le temps de réfléchir à des idéaux tellement ancrés en nous que nous agissons, que nous punissons, persuadés du bien-fondé de nos actes. “Mettre au coin un enfant ne lui a jamais fait de mal!” entend-t-on souvent dire.
Toutefois, arrêtons-nous quelques instants sur cette idée: si punir éduquait nos enfants, une seule punition suffirait, non? Ils ne recommenceraient plus! Et cet article n’aurait pas lieu d’être, tout comme la pertinente question de cette jeune maman.
Malheureusement, tout n’est pas si radical pour la simple et bonne raison que le cerveau d’un enfant ne fonctionne pas comme celui d’un adulte. La clef du mystère est levée: les connexions neuronales ne sont pas toutes opérationnelles. Un enfant n’a pas les capacités cérébrales pour réagir comme le ferait un adulte. Le cortex n’est pas entièrement disponible et les réseaux synaptiques sont en pleine construction…celle-ci ne s’achèvera qu’après l’adolescence!
Ainsi que le souligne, Isabelle Filliozat, dans son livre “J’ai tout essayé”, “Ce n’est qu’à partir de quatre ans que [l’enfant] pourra se sentir coupable en dehors du regard de l’adulte, c’est-à-dire qu’il aura intériorisé l’image du parent mécontent et percevra le lien entre ses actions et ce mécontentement”. D’ailleurs, avant cet âge, “il s’agit surtout [pour lui] d’exercer sa coordination motrice. L’action le fascine; il n’a pas encore la possibilité d’inhiber seul ses impulsions et est tout entier dans l’ici et maintenant de l’action. De plus il n’a pas d’image mentale stable dans sa tête et ne réalise le résultat de ses actes que lorsque [nous intervenons]”, continue Isabelle Filliozat.
Bien sûr, ne pensons pas de fait que nos enfants sont de petits anges innocents. Seulement, ils fonctionnent sur le mode de l’instinct et de l’affect. Leur capacité d’analyse fine, d’anticipation ou autre ne sont pas disponibles encore mais à l’intérieur, tout est en effervescence. Ils agissent sur l’instant: si un enfant tenant un verre en main le laisse tomber, il ne fait pas le lien cause-conséquence que nous, adulte, établissons. Et quand bien même, il a compris que c’est bien son verre qui est tombé par terre, il éprouve déjà tellement de culpabilité à l’avoir fait tomber, qu’il n’a pas besoin d’être sermonné davantage. Sa réaction émotionnelle est de se sentir rejeté par celui qui le dispute. Et jusqu’à preuve du contraire, ce n’est pas cela élever un enfant.
Punir n’est pas signe d’autorité
En punissant donc, nous pensons élever, éduquer notre enfant pour lui enseigner les bonnes manières, le ranger dans le droit chemin. Je me penche une nouvelle fois sur les propos d’Isabelle Filliozat pour renforcer mon idée: “L’illusion provient aussi du fait que les punitions ont une efficacité à court terme, non pas en terme d’éducation, mais de soulagement du punisseur, qui a ainsi l’impression de reprendre le contrôle de la situation. […] Nous punissons par manque d’autorité!” Qui plus est, le décalage est énorme entre ce que nous pensons apprendre à nos enfants par ce biais et ce qu’il perçoit réellement. A part de la culpabilité et une perte de confiance chaque fois plus grande, il ne retire pas grand chose de nos punitions. “Elles font honte à l’enfant et bloquent plus encore le processus sain du sentiment de culpabilité qui aurait permis de prendre conscience de l’acte commis au profit du sentiment d’être mauvais en tant que personne.”
Souvent d’ailleurs, à force de punir, le cycle infernal s’installe. Je m’explique: un enfant qui fait une bêtise est un enfant qui s’exprime. Punir cette expression c’est freiner l’évolution de notre enfant. Si la réponse à une bêtise est systématiquement une punition l’enfant va se jouer de nous et déplacer les limites à sa guise jusqu’à ce qu’il soit entendu. Un enfant ne cherchera à franchir les limites que là, où par ailleurs, il sentira les failles.
Les enfants ont bien évidemment besoin de limites et de cadres. Point besoin de punitions: nous sommes les limites et l’autorité. Nous sommes la clef de voûte de nos enfants. Ne reportons pas , du moins pas continuellement, l’autorité sur la punition.
Et la sophrologie dans tout ça?
Dans le registre de l’éducation bienveillante, la sophrologie est un outil formidable tant pour l’enfant que pour le parent. Un parent présent à soi est un parent pleinement réceptif à son enfant, et n’a besoin d’aucun autre référent pour élever son enfant, par conséquent. Mettre en pratique des principes aussi justes et aussi fondés soient-ils ne porte ses fruits que quand nous, parents, Existons, au sens fort du terme. C’est seulement à partir de ce moment-là que notre rôle de parent-guide prend toute sa force. La sophrologie permet, entre autres, de relativiser. C’est d’ailleurs l’un des premiers apports. Petit rien qui fait pourtant toute la différence en matière d’éducation. En lâchant prise , notre stress nous pollue moins. Plus à l’écoute de nous-même, nous le devenons donc envers nos enfants. Etre pleinement soi, présent à soi inspire la confiance à nos enfants. Se sentant en sécurité ils prennent pleinement acte en l’existence. Un enfant qui a confiance en ses parents et un enfant qui aura confiance en lui.
S’approprier les outils de la sophrologie est d’une efficacité incroyable: les parents reprennent confiance en eux et sont ainsi capables de mieux comprendre les émotions et les actions de leurs enfants. Puis progressivement, s’installe cette autorité si naturelle de l’être ancré pleinement dans sa vie.
Les enfants, quant à eux, apprennent à évacuer tout le stress provoqué par des punitions à répétition. Plus sereins dès lors, ils se construisent en toute confiance. En effet, ” les émotions causées par la punition stimulent le circuit du stress et empêchent l’enfant de réfléchir à ce qu’il a fait. La mémoire fonctionne, oui, mais l’enfant mémorisera le stress, la peur du parent, et non pas ce qui aura déclenché la punition. Les punitions n’enseignent que la peur du gendarme et non pas responsabilité et autodiscipline. La peur et la honte engendrées par les punitions inhibent les fonctions cérébrales supérieures, ce qui a un impact sur les performances intellectuelles, la vie émotionnelle et la socialisation[…] et peut provoquer plus tard des troubles de l’anxiété.” Ibid. La sophrologie est l’arme anti-stress par excellence, grâce à des outils si simples et faciles d’accès qu’ils en sont déconcertants de logique!
Lucie Pouille.
Source des citations: Isabelle Filliozat, “J’ai tout essayé”, éditions Poche Marabout.